Barthélémy Toguo : Hidden Face IV 2013
Aquarelle sur papier marouflé sur toile, 107.90 cm Collection Galerie Lelong
Barthélémy Toguo : What’s your name ?
2005 Technique mixte sur papier 208.130 cm Collection Lelong
Cyprien Tokoudagba : Aziza
1997 huile sur bois 275.163 cm Coll Centre d’Art Contemporain
Pilier architectural sculpté Bornéo, XVIIIème siècle, 160.40 cm
Collection Gert Henry Van Den Loop
Coco Fronsac : Le masque et son morse (Chimères et merveilles)
2012 gouache sur photo ancienne 40.30 cm Collection artiste
Coco Fronsac : Elle HOOQ au pays Breton (Chimères et merveilles)
2009 gouache sur photo ancienne 16.23 cm Collection artiste
Coco Fronsac : Le rêve de l’éléphant blanc (Chimères et merveilles)
2008 gouache sur photo ancienne 28,7.22,2 cm Collection artiste
Coco Fronsac : Le rhinocéros et la libellule (Chimères et merveilles)
2010 gouache sur photo ancienne 46,5.36 cm Collection artiste
Bengt Lindström : Les enfants de bourgeois
1969 peinture sur toile 146.144 cm Collection privée
Bengt Lindström : L’impassible
1963 huile sur toile 190.130 cm Collection particulière
Bengt Lindström : Troll
1989 200.100 cm Collection Galerie Vallois
Bengt Lindström : La dame de coeur
1965 peinture sur toile 146.97 cm Collection privée
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Pour l’exposition d’été du Centre d’Art Contemporain de Tanlay (près Tonnerre, dans l’Yonne), Louis Deledicq a eu l’heureuse idée d’inviter des inventeurs-fabricants de machines à remonter le temps, à contre-courant du futurisme alzheimeriste tranquille du monde « contemporain » (en particulier de son art), qui préfère les machines à abolir le temps ou, à la rigueur, l’anticipationner.
Ces « chronoscaphes » ne permettent pas des voyages vers le Passé aussi exacts que la machine mise au point par le professeur Miloch dans Le piège diabolique ou la DeLorean DMC-12 modifiée par le Docteur Emmett Brown dans Retour vers le futur : pour retrouver les voies perdues des mythes et des rites qui les actualisent, les artistes-bricoleurs rassemblés à Tanlay utilisent des « techniques » primitives, d’avant La Technique.
Bengt Lindström (Laponie, 1925 – 2008) partait à la recherche des figures fauves, magmatiques et convulsives qui hantaient son imagination avec de grandes toiles posées au sol, des grands seaux de peinture de couleurs premières (rouge, jaune, vert, bleu, blanc et noir) et d’énormes brosses (il en rapportait des tableaux dont l’intensité sauvage donne une assez bonne approximation de ce que peindrait un tsunami coloriste, et fait mieux que soutenir la comparaison avec des oeuvres de Jorn, Appel, Vlaminck ou Van Gogh); Barthélémy Toguo (né en 1967, au Cameroun) fait apparaître des diables (pas trop méchants) et des … gens, avec du papier, de l’encre de Chine et de l’aquarelle ; Coco Fronsac (née en 1962, à Fontenay-aux-roses) projette dans l’ailleurs du chamanisme inuit des occidentaux qui sont désormais dans un tout autre monde d’esprits en peinturlurant de très vieilles photos ; Cyprien Tokoudagba (Abomey, 1939 – 2012) rendait visibles les divinités vaudou en les peignant et en les sculptant, et selon une démarche analogue, parfaitement traditionnelle, les nombreux artistes anonymes qui ont réalisé les sculptures originellement sacrées rassemblées par Gert Henry Van Den Loop et quelques autres collectionneurs n’ont pas utilisé des matériaux plus modernes que le bois, la pierre, et éventuellement des crânes, des cheveux ou quelques pigments.
Ces diverses « invitations au voyage » – qui vous transportent dans des régions d’origine sans même demander la permission – agiront différemment, sans doute, selon votre situation dans l’Espace et dans le Temps : un Inuit, un Népalais, un adepte du vaudou, un expressionniste surréalisant passé par Cobra, un africain fidèle à sa culture animiste d’origine, un addict de l’art brut ne seront pas enthousiasmés par les mêmes transports, transportés – individuellement et en commun – par les mêmes objets de ferveur. Pour moi la révélation de cette exposition est Bengt Lindström : en comparaison de ses peintures hurlantes (toutes ses oeuvres sont des variations sur Le Cri de Munch), tout le reste paraît fade et illustratif, seulement « intéressant » (Mais je suis content d’avoir découvert les oeuvres de Barthélémy Toguo et Cyprien Tokoudagba, ou redécouvert celle de Coco Fronsac, entrevue dans une galerie de la rue de Seine ; et je ne puis qu’applaudir de toutes mes mains à une exposition qui affirme si vigoureusement un point-de-vue anthropologique sur l’art en donnant à voir des objets aussi magnifiques qu’exotiques – qui persistent à avoir une vie après le musée du Quai Branly … Un grand merci, donc, à Louis Deledicq, à ses amis artistes et collectionneurs, et à tous ceux qui ont contribué à cette invasion de dieubles – d’un genre nouvellement ancien et anciennement nouveau – dans l’aire paisible du château de Tanlay)