quand même, ces massues si décoratives servaient à tuer …

 

des scies, ça ? si, si, décidément des scies (requinquantes, même)

 

nuage se rêvant pierre, ou pierre se rêvant nuage ?

 

les premières machines volantes n’étaient pas très convaincantes non plus

 

chacune de ces curiosités, de son vivant,

n’était sans doute pas très curieuse de voisiner avec les autres

 

« à peu près de la grandeur d’un chameau » …

7 roue de poissons

c’est ça, la Grande Roue … si j’aurais su …

8 animaux marins dans le plafond

beau comme la rencontre, dans le ciel d’un cabinet de curiosités,

d’un crocodile, d’un requin, d’un canoë et d’une raie (?)

9 araignée de mer dans le plafond

on serait curieux d’observer des gens qui ont ce genre d’araignée dans le plafond,

mais, si possible, de loin (voire de très loin)

10 conserves et minéraux

les minéraux leur font grise mine, mais, comme disait Maurice Mac-Nab (1856 – 1889),

« comme ils sont mignons, ces foetus »

11 le double paon

déjà que ce gros vaniteux se prend pour le roi des oiseaux,

mais qu’on nous fasse jouer le rôle d’ocelles !

12 machine à graver les fonds

mèkèce ?  – une « machine à graver les ciels et les fonds »,

inventée en 1803 par Nicolas-Jacques Conté (1755 – 1805),

qui devait se faire un nom dans le crayon

13 mammouth cathédrale

les mammouths ayant été des cathédrales ambulantes,

s’ils avaient vécu plus longtemps, la face du Moyen Âge …

14 amonites en bande

ammonites rock’ n’ roll

15 squelette de dino

– Le camarade Camarasaurus, camarade     – Camarade Livingstone, enchanté

16 art abo et os dino

art abo et os dino

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    Il y a actuellement, au musée des Confluences, à Lyon, une très belle exposition consacrée aux « cabinets de curiosités » [basée sur celui du grand voyageur Balthasar de Monconys (1611 – 1665), qui est à l’origine du Cabinet d’Histoire naturelle de Lyon (1777), qui deviendra en 1826 le Muséum d’Histoire naturelle de Lyon, dont le musée des Confluences (décembre 2014) est le plus récent avatar], mais c’est tout le musée qui est conçu comme un immense Cabinet de curiosité, dans lequel se mêlent joyeusement des objets relevant de sciences ordinairement aussi strictement séparées que l’ornithologie, l’entomologie, la minéralogie, l’ichtyologie, la paléontologie, la biologie, l’ethnologie, l’anthropologie, la préhistoire, l’archéologie, l’histoire de l’art (moderne et contemporain), la thanatologie, l’égyptologie, la sinologie, l’histoire des techniques, la physique, l’astrophysique, la cosmologie, la géologie, la sociologie, … sans parler de toutes les disciplines dans lesquelles celles-ci se subdivisent … Enfin un musée bordelique ! Ça change de la Grande Galerie de l’Évolution, où tous les animaux sont bien à ce qu’on suppose être leur place dans une succession que l’on croît parfaitement expliquée par un non Dieu qui joue aux dés (Einstein les a pourtant prévenus), et où on a le droit d’admirer ma non troppo, des fois qu’on se mettrait à penser que papillons, antilopes, baleines, oiseaux de paradis ou pigeons sont des merveilles qui toutes dépassent infiniment notre intelligence , ha ha, nous dépasser, nous qui avons découvert la Sélection Naturelle et le Big Bang, vous voulez rire, puisque on sait quand ont vécu les dinosaures, c’est comme si nous les avions fait, et de même pour tout, des fougères géantes aux vers de terre, des tricératops aux coléoptères, des cachalots aux manchots !

   Dans les « Wunderkammern » (Chambres des merveilles) ou les « Cabinets de curiosité » d’autrefois (la grande période va de la Renaissance au début du Siècle des Lumières, ensuite les musées scientifiques modernes prennent le relai), on pouvait voir aussi bien des instruments astronomiques, des figures mathématiques, des cartes du Ciel, des pierres précieuses, des racines, des animaux de toute sorte, des coquillages, des horloges, des peintures, des chefs-d’oeuvre de marqueterie, des armures, des robes, … tout cela ayant en commun d’être éblouissant, époustouflant, prodigieux : merveilleux. Et on ne se souciait pas trop de situer ces objets-trésors dans une quelconque histoire – ce qu’on aurait été d’ailleurs bien incapable de faire. L’exploration systématique du monde et l’inventaire de ses richesses a permis de découvrir d’innombrables espèces, actuelles ou disparues, et d’innombrables corps auparavant insoupçonnés, dans l’immensément grand ou l’immensément petit, mais cette extension phénoménale du nombre des merveilles (que les Anciens aient pu le limiter à sept en est aussi une nouvelle …) va très paradoxalement avec un rabougrissement non moins phénoménal de notre faculté d’émerveillement. Rabougrissement qui passe notamment par la constitution de compartiments dans lesquels on range soigneusement les objets du monde, distingués fondamentalement entre éléments de la Nature et éléments de la Culture – comme si les composantes essentielles de toute culture, à commencer par la langue, n’étaient pas naturelles, et n’importe quel organisme un miracle de technicité -, et qui ensuite ne communiquent plus.

   Au musée des Confluences, on peut voir dans le même espace des squelettes de monstres du Jurassique et des peintures aborigènes, des femmes préhistoriques en cire et des représentations par des sculpteurs contemporains de Sedma, la divinité qui est à l’origine du peuple inuit, des autres hommes et des esprits terrestres, des fossiles bien nommés et situés dans l’histoire évolutionniste de la Vie et des œuvres issues de cultures qu’on n’ose plus trop dire « primitives », qui traduisent des conceptions essentiellement surnaturalistes de la même Vie. Il y a des contrepoints à la « théorie scientifique de l’Évolution », et les merveilles en tout genre vont voir ailleurs si elles n’y sont pas aussi. Je ne suis pas sûr qu’un tel tohu-bohu dans le musée ait des motivations philosophiques bien claires : des raisons de muséographie contemporaine et d’un espace somme toute réduit pour montrer des collections hétérogènes auront joué probablement un rôle plus décisif. Mais le résultat est là, et c’est une fête pour les hurlueurs de berlue de 4 à 104 ans.