En même temps qu’Antonio Saura (1930-1998) et Arnulf Rainer (1929), mais avec des moyens et dans des intentions beaucoup plus variées,  Rudolf Fila (1932 – 2015) a inventé la peinture comme art – ou anti-art – de métamorphoses expressives, d’ « interprétations ». « L’objet » commenté pouvait être un tableau – peint par lui ou par d’autres – ou une reproduction – page de calendrier, de livre de photos, affiche, sérigraphie kitsch -, et le commentaire pouvait prendre de très nombreuses formes – recouvrement partiel ou total, par un trait de pinceau plus ou moins large, sinueux, lent, coloré, énergique, … ou par la pulvérisation d’encre de Chine en préservant quelques parties du support, … – comme de très nombreuses valeurs : critique, sarcasme, annulation, camouflage, bousillage, mais aussi caresse, exaltation, soulignement, amplification, dévoilement, éclairage, … . Dans tous les cas, il s’agissait de renouer un rapport vivant à des images figées – par le classicisme des oeuvres reproduites, s’il s’agissait d’oeuvres, et dans tous les cas par la technique faussement fidèle de la « reproduction ».

Cette activité « interprétative » s’est notamment exercée sur des livres de reproductions qu’il se procurait pour quelques couronnes – personne d’autre ne s’y intéressait – dans  les « antikvariat » (librairies d’ancien) de Bratislava, Brno ou Prague, et qu’il « traitait » en général intégralement, de la première à la dernière page. 

   Voici quelques pages très librement « recolorisées » d’un livre des années 50 sur Bonnard, peintre qui lui était particulièrement cher.

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